Conclave : pour qui la fumée blanche ?

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Qui succédera à Benoit XVI. Le week-end passé,le quotidien français Le Monde faisait le point sur la question. (© Pierre Nouvelle)

 

Cela y est ! Les portes de la chapelle Sixtine se sont fermées, et nul ne sait pour combien de temps ! Si chacun ignore la durée et le verdict du conclave de l’Eglise catholique, une seule chose est sûre : tout comme les fidèles de l’Eglise romaine, la diversité est bien réelle entre les cardinaux. Petit parcours dans cette nstitution bimillénaire.

Les 115 cardinaux sont entrés ce mardi après midi 12 mars dans la chapelle Sixtine. Mais d’une douzaine d’entre eux sont qualifiés de «  papabile », c’est-à-dire potentiellement pape. Il suffit de lire ou d’écouter leur portrait chez nos confrères pour se faire une petite idée des différences qui les caractérisent, D’avis général, Christoph  Schönborn, archevêque de Vienne, dominicain de son état, ferait partie de l’aile « moderniste » de l’Eglise catholique. Tout comme Odilo Scherrer, un Brésilien d’origine allemande, primat de sa conférence épiscopale ou à l’autre bout du continent américain Óscar Andrés Rodríguez Maradiaga, évêque hondurien de Tégucigalpa. Dans ce vivier d’élus possibles, on trouve des cardinaux plus sensibles aux sirènes de l’orthodoxie ecclésiale. Par exemple, Marc Ouellet, le Canadien, Albert Malcom Ranjith, originaire du Sri Lanka ou Angelo Scola, archevêque de Milan.

En 2005, le scrutin s’est déroulé autour de deux personnes : l’archevêque de Milan, Mgr Martini, et le préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal Joseph Ratzinger. Huit ans plus tard, le jeu semble plus ouvert puisqu’on évoque six à douze papabili possible. (© Pierre Nouvelle)

Sensibilité pastorale ou théologique, pays d’origine, âge : des critères de choix

Plusieurs facteurs entreront dans le choix de l’assemblée élective. Leur sensibilité bien sûr, qu’ils ont eu l’occasion de mieux percevoir durant les « congrégations », ces réunions préparatoires, au-delà des rumeurs des gazettes que les cardinaux lisent ou écoutent aussi,. Leur âge aussi, (plus ou moins de 70 ans ?) tant il est sûr que la démission d’un Benoît XVI fatigué moralement ou la fin de vie d’un Jean-Paul II, à bout physiquement, ont marqué. Le continent sans doute, européen, américain, asiatique, africain, tous marqués par des réalités et des défis qui peuvent les opposer.

Leur proximité avec le petit monde romain ou les grandes composantes de l’administration catholique, qu’il s’agisse de la Congrégation pour les évêques ou le Conseil pontifical Cor unum, ou la très solidaire Caritas internationalis.

La presse catholique, elle aussi très diverse

Si en plus des rigueurs de la neige qui frappe 25 départements français, les journaux télévisés généralistes ont ouvert ce matin leurs éditions sur le premier jour du conclave, c’est vers la presse spécialisée qu’il faut se tourner pour percevoir les sensibilités qui traversent les lecteurs et auditeurs de différents médias catholiques. Car, comte tenu de leur périodicité, tous ont des prolongements avec des sites Internet d’information en continu.

Témoignage chrétien qui affiche une ligne franchement à gauche et « résistante », partage sa « Une » entre le second anniversaire de la catastrophe de Fukushima et le blog de Christine Pedotti. La co-fondatrice du Comité de la jupe et de la Conférence des baptisés de France insiste sur sa rencontre dans les rues de Rome avec un évêque français à vélo qui lui a confirmé que « autant la dernière fois il y avait un coureur en tête qui dépassait tout le monde, autant aujourd’hui personne ne se détache vraiment. À son avis, que je partage, il faudra attendre le premier tour de scrutin pour avoir une sorte de cartographie des forces en présence. » Famille chrétienne donne la primeur à la manifestation du 24 mars contre le mariage pour tous, et en second lieu axe son propos autour de la question « Pourquoi et comment le pape est-il infaillible ? ». Une façon de faire un retour en arrière de plus de 140 ans, puisque c’est au concile Vatican en… 1870 qu’a été promulgué ce dogme. La Vie , hebdomadaire centré lui aussi plutôt à gauche consacre toute la page d’accueil de son site Internet à l’événement romain : un éditorial du directeur de la rédaction Jean-Pierre Denis « D’un pape à l’autre, quelle Eglise », un billet de Jean-Claude Guillebaud sur « L’anticléricalisme des saints » et un livre propos d’un militant écologiste, Jean-Claude Pierre qui rêve d’un pape vert. Un songe qui est complété par ceux de l’avocat Guy Aurenche, président de l’ONG catholique CCFD-Terre solidaire, du journaliste Patrice de Plunkett et du prêtre lyonnais, fondateur d’Habitat et humanisme, Bernard Devert. Golias, magazine contestataire très bien informé, développe sur son site Internet une succession d’articles accrocheurs sur « le nom du prochain pape à l’épreuve des statistiques », « Le feuilleton du conclave », « Préparation du conclave : un climat opaque ».

Depuis plusieurs semaines, la presse écrite et audiovisuelle analyse et commente la situation au Vatican. (© Pierre Nouvelle)

Encore plus au centre, le magazine Pelerin  fait de sa page d’accueil Internet une vitrine des cardinaux, les papabili possibles comme le Nigérian John Olorunfemi et les improbables, tels le capucin Sean O’Malley de Boston, ou son collègue d’Arlington, l’évêque noir Peter Tuckson. Un prélat dont on peut visionner l’interview comme celle du Primat des Gaules, le Lyonnais Philippe Barbarin sur le site de l’hebdomadaire.

Mais en fait, c’est le quotidien la Croix qui éclaire sans doute le mieux les enjeux. Dominique Greiner envisage un conclave plus ouvert qu’en 2005 (au moins six papabili au lieu de deux alors), un conclave sans doute plus long que les quatre tours de scrutin qui ont porté Benoit XVI à la tête de l’Eglise catholique, et un choix où les qualités spirituelles, mais aussi personnelles, seront déterminantes.

Radios et télé aussi dans le sérail de l’info en continu

Du côté des radios, le réseau des radios chrétiennes francophones RCF installé à Lyon a enrichi ses programmes avec des envoyés spéciaux sur place et des émissions spéciales dont une correspondance quotidienne de Pauline de Torsiac dans le journal de 12h30 et un magazine de Jean-Christophe Galéazzi. La radio retransmettra bien sûr la messe d’ouverture du conclave (10h ce mardi) et la procession d’entrée des cardinaux dans la chapelle Sixtine (17h30) pour une émission coproduite par RCF, Radio Notre Dame et Radio Vatican.

La Parisienne Radio Notre Dame sera aussi mobilisée sur l’actualité, mais son site Internet privilégie une accroche très interne et spirituelle, avec un accent mis sur la méditation et la prière.

Du côté des télévisions, l’officielle KTO donnera à voir les événements importants en développant un large programme en direct de Rome. Un accès gratuit, grâce à internet, qui tranche avec le péage habituel de cette station. Comme pour le quotidien La Croix, qui avait pour le moins réservé lors de l’élection de Benoit XVI en avril 2005, il faudra suivre avec attention la télévision de l’épiscopat français, qui pourrait laisser percer la réaction des trois cardinaux hexagonaux (Jean-Pierre Ricard de Bordeaux, Philippe Barbarin de Lyon et André Vingt-Trois de Paris, président de la conférence des évêques.

Primus inter pares ou patriarche comme les autres

Un fil rouge devrait les guider : le souhait de trouver un consensus (deux tiers des suffrages) autour d’un primus inter pares, premier entre ses pairs, qui au-delà d’être le pape de l’Eglise catholique romaine, soit un papa, capable de parler avec les pères d’autres familles chrétiennes que sont les patriarches du bassin méditerranéen de confession orthodoxe, par exemple, ou les responsables protestants et du Conseil œcuménique des Eglises. Une attitude qui ira plus loin qu’un simple casting pour aborder une des questions de fond : celui de l’autorité et du magistère ecclésiaux. Un défi à venir pour le futur titulaire de la chaire de Pierre au Vatican.

Jean-François Cullafroz

 

 

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