2018-1968 (2) : il y a 50 ans, un mouvement libertaire

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De Pancho Vila et de la révolution mexicaine au campus de Nanterre, une m^me soif de changer la vie (© DR).

De Poncho Villa et de la révolution mexicaine, au campus de Nanterre et au mouvement du 22 mars, une même soif de changer la vie (© DR).

A la Sorbonne, on les a appelé les « katangais », et à Lyon à la fac de lettres sur les quais du Rhône, c’était les « trims », les « trimards »… Trois des leurs (Michel Raton, Marcel Munch et Michel Mougins), furent arrêtés à l’issue de la manif du 24 mai 1968, inculpés après le décès du commissaire René Lacroix, puis blanchis au terme de deux ans de prison à St Paul-St Joseph. L’historienne lyonnaise Claire Auzias lève le voile sur leur parcours et révèle des archives et témoignages méconnus. Rencontre avec cette historienne, et avec Jean-Marc Bonnard, un des responsables de l’Atelier de création libertaire implanté à Lyon.

Claire Auzias était lycéenne en mai-juin 1968, et a participé à la fondation de Comités d’action lycéens, tout en participant au Mouvement du 22 mars lyonnais. Brondillante, elle a fréquenté les amphis et les couloirs des facultés, là-même où quelques années plus tard, elle soutiendra son doctorat d’histoire. Claire se passionne depuis toujours pour ceux que l’on appelle les « marginaux » : anarchistes, militants libertaires, populations roms, et aux luttes atypiques comme les ouvrières de la soie, les ovalistes de Lyon

Agel-Unef, CFDT et PSU : une attitude originale

Avec Trimards, Claire Auzias revisite les mois de mai-juin 68 à Lyon, mais aussi dans d’autres villes de France, par le prisme de ces jeunes de milieu ouvrier, parfois en déshérence familiale, mais aspirant ) plus de justice et de liberté. Elle souligne la difficulté de cohabitation, voire le rejet même entre étudiants (seulement 7 à 8 % étaient alors issus du monde ouvrier) et enseignants et ceux que l’on qualifiera plus tard de « loubards ».

Elle souligne aussi le rôle original tenu en commun par l’Agel-Unef, la CFDT et le PSU. Elle insiste sur l’attitude de la CFDT dès le 12 juillet 1968 (voir le journal La Voix de la CFDT du Rhône) pour la réhabilitation des jeunes Marcel Munch, Michel Raton et Michel Mougins. C’est d’ailleurs, un militant CFDT, Daniel Véricel qui les aidera à trouver du travail à la sortie de prison.

Cinquante ans après le mouvemnt de mai-juin 68, il n'est pas initile de se pecher sur le déroulement de ces événements, mais aussi sur la suite durant le demi-siècle qui a suivi (© Pierre Nouvelle).

Cinquante ans après le mouvement de mai-juin 68, il n’est pas inutile de se pencher sur le déroulement de ces événements, mais aussi sur la suite durant le demi-siècle qui a suivi (© Pierre Nouvelle).

Brièvement, elle évoque la personnalité du commissaire René Lacroix venu pont La Fayette pour « calmer ses jeunes » collègues CRS, alors qu’il n’était  pas en service, et victime d’une crise cardiaque et non d’un écrasement par un camion. Elle cite largement le témoignage du docteur Grammont, jeune interne de l’hôpital Edouard Herriot, qui témoignera en ce sens au procès aux Assises du Rhône fin septembre 1970, et conduira au blanchiment des trois inculpés.

Le Comité de libération des prisonniers politiques

Elle lève aussi le voile sur l’action du Comité de libération des prisonniers politiques suite à mai-juin 68, sur la présence lyonnaise du Mouvement du 22 mars, et plus globalement sur les parcours personnels de ces « trimards », improprement appelés voyous.

Trimards, Pègre et mauvais garçons est un livre à lire avec gourmandise et intérêt, y compris pour les militants cédétistes de 1968, qui n’ont pas eu une approche détaillée des événements et des motivations des milieux libertaires.

Nous avons rencontré Claire Auzias fin novembre 2017 lors de la sortie de la présentation de son libre au siège du Centre de ressources sur les alternatives sociales (Cedrats). elle présente son dernier ouvrage.

Une maison d’édition alternative

Le milieu de l’édition est une monde parsemé d’embûches, où les appétits financiers sont régis par les grands groupes. Aussi, la publication de livres qui sort des sentiers battus n’est pas un chemin semé de pétales de roses. Et pourtant, en région, de nombreuses petites maison d’édition effectuent un travail littéraire incomparable, bien éloignée des grands tirages ou des romans de gare.

Ainsi, en va-t-il à Lyon, ville où, entre Rhône-et Saône, l’édition fait florès depuis l’apparition au 15e siècle de l’imprimerie. Un musée de l’imprimerie et de la communication graphique, rappelle d’ailleurs cette histoire, ses moments marquants et son actualité au 20e siècle.

L’Atelier de création libertaire participe de ce mouvement éditorial, artistique et poétique, lié à la mouvance littéraire en général, et anarchiste en particulier. Jean-Marc Bonnard est un de ses responsables. Il présente la démarche suivi par les animateurs de cet atelier éditorial.

Trimards, Pègre et mauvais garçons, Claire Auzias, Atelier de création libertaire, 18 €, dans toutes les bonnes librairies.

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