Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste carte de presse 49272, correspondance pour Le Courrier (quotidien de Genève)
Le 13e congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES) s’est terminé vendredi 2 octobre à Paris. Au terme de quatre journées très denses, les neuf délégués suisse des deux confédérations syndicales (USS et Travail-Suisse) ont approuvé le Manifeste qui sera la feuille de route jusqu’en 2019. Retour au plein emploi, opposition à l’austérité, remise en route du dialogue social, place des jeunes, des femmes et des personnes migrantes sont mis en exergue des préoccupations syndicales européennes.
Solidaires avec les personnes migrantes et travailleurs étrangers
« Nous sommes complètement solidaires et totalement concernés par les décisions des syndicats européens », tels sont les propos conjoints de Adrian Wütricht et Andreas Rieger, les deux chefs de délégations des syndicats Travail-Suisse et USS. De fait, parmi les 500 délégués et 1500 observateurs réunis salle de la Mutualité à Paris, les représentants du mouvement syndical helvète ont approuvé, tant le rapport d’activité 2011-2015 que les orientations de la CES pour les quatre années à venir.
« Nous voulons être solidaires avec les travailleurs étrangers et les migrants en général. Nous nous employons auprès de nous adhérents pour faire avancer cette volonté », souligne Adrian Wütricht de Travail-Suisse (voir interview vidéo). Et Andreas Rieger de l’USS, insiste comme son collègue sur les mesures d’accompagnement. Après les votations et initiative anti-immigrés, alors que la loi doit être mise en œuvre d’ici deux ans, c’est bien son harmonisation avec les règles européennes qui est posée. Et sur ce terrain, les deux confédérations suisses des salariés et retraités, compte bien mettre tout leur poids pour que la liberté de circulation des capitaux aille de pair avec celle des personnes.
Contre le dumping social et la dérégulation
Tout en soulignant que ce sont les entreprises qui vont chercher des travailleurs étrangers, Andréas Rieger ne se dédouane pas de ses responsabilités. Dans une période où la dérégulation sociale avec son lot de flexibilité est aussi l’apanage de la Confédération, le syndicalisme suisse entend bien que des garanties nouvelles soient apportées aux salariés.
Par exemple en matière de rémunérations. « Notre initiative pour un salaire minimum a échoué de peu, mais nous avons enregistré des acquis dans certains cantons, comme le Jura ou le Tessin. A nous d’aller plus loin si nous voulons rassurer les travailleurs ! », clame-t-il. Car il en va du soutien des salariés aux revendications de syndicats qui réunissent aujourd’hui 500 000 personnes sous leurs bannières. « Nous entendons démontrer que l’accueil de salariés étrangers est un « plus » pour notre économie nationale, et non pas la source d’un dumping social qui reine l’augmentation des salaires ».
Passer des paroles aux actes
Pour cela, à l’instar de la CES qui a mis ce point au centre de son Manifeste 2015-2019, les syndicats SSR et Travail-Suisse comptent bien unir leurs efforts pour que le dialogue social redevienne la règle dans le pays. « une partie du patronat n’en veut pas, mais heureusement encore une moitié des chefs d’entreprises estime que les conventions collectives et accords sociaux sont une nécessité pour la bonne marche de l’économie ».
Témoignage d’Adrian Wütricht, présidente de Travail-Suisse.
Un manifeste contre l’austérité et pour le dialogue social
Assurément, à Paris, le 13e congrès de la Confédération européenne des syndicats a marqué une volonté partagée, et pas seulement en Grèce, en Espagne ou au Portugal, pour une action syndicale plus forte s’appuyant sur un nouveau rapport de forces. Dans ce cadre, les syndicalistes, y compris suisses, entendent bien s’appuyer sur la volonté de dialogue social réaffirmée en début de congrès par Jean-Claude Juncker, François hollande et Martin Schultz. Une orientation qui tranche avec celle de l’ancien président de l’Union européenne Manuel Barros.
A cet effet, les syndicalistes européens ont rajeuni la direction de la Ces, avec par exemple l’entrée au secrétariat général de l’Alsacien Thiébaut Weber, à peine 30 ans, issu des rangs de la CFDT. Ils veulent désormais voir une traduction dans les faits des paroles des dirigeants européens, dans leur marche vers « une société juste », qui était le slogan de cette rencontre internationale des salariés.
Jean-François Cullafroz