Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272
Louis Viannet, ex-secrétaire général de la CGT nous a quittés dans la nuit de ce samedi 21 au dimanche 22 octobre 2017. Le décès de ce militant syndical de premier plan vient à s’ajouter à celui de ses collègues cédétistes Edmond Maire, disparu le 1er octobre, et Jacques Moreau, décédé au début de l’année 2017. Ce départ intervient aussi un peu plus d’un an après ses camarades Georges Séguy et Albert Détraz, deux autres responsables nationaux de la CGT et de la CFDT. Louis Viannet devait intervenir lors du Colloque CFDT 1968-2018 qui aura lieu les 21 et 22 mars 2018 à l’Université de Lyon. Dans ce cadre, dans sa maison de Félines (Ardèche), il avait reçu Jean Auclerc et Jacky Cerdan, anciens responsables CFDT des Postes dans le Rhône. La rencontre amicale se déroulait à quelques kilomètres de Vienne et de Saint-Etienne, deux villes où le leader CGT était né, puis avait fait ses études et débuté son engagement syndical et politique. Récit et publication de trois entretiens de l’été 2017. A proximité aussi de Chavanay, qui étaient cher au cœur de ses parents qui avaient là leur maison et qui sont enterrés dans le cimetière local.
8 août 2017, Félines, à quelques kilomètres de la vallée du Rhône, dans cette région du Pilat, frontalière de l’Ardèche et de la Loire. Deux anciens postiers, militants de la CFDT, ont rendez-vous avec leur ancien collègue Louis Viannet. Ils l’ont connu entre la fin des années soixante et le début des années soixante-dix, et ont partagé avec lui nombre de luttes. L’unité d’action des deux fédérations et syndicats départementaux n’ont pas occulté la spécificité de chacune des deux sensibilités sociales, même si une analyse marxiste commune a facilité les rapprochements.
Il y a là Jean Auclerc et Jacky Cerdan. Jean Auclerc est quasi-conscrit de Louis Viannet. Il a fréquenté son camarade quand tous deux; ils étaient secrétaire généraux des syndicats départementaux CFDT et CGT du Rhône.
Louis Viannet, ancien salarié du centre des Chèques postaux de Lyon était bien connu chez les postiers. C’est dans la Loire que ce Viennois de naissance avait fait ses premières armes professionnelles au sein de l’administration postale, mais depuis 1953, il militait syndicalement et il est à Lyon depuis 1956.
En 1968, à la RP de Lyon, ils noua s a aidés à nous mettre en grève
En 1968, Louis Viannet et Jean Auclerc et leurs équipes respectives vont faire débrayer les uns après les autres les différents services des PTT : centraux téléphoniques, centres de tri postaux, Grand’Poste.
C’est ici que Jacky Cerdan tout jeune et tout nouveau militant CFDT fait connaissance du leader CGT. » Je me souviens très bien quand il est venu nous voir en pleine nuit à la RP (Recette principale). Les copains étaient prêts à se mettre en grève, et lui n’était pas trop chaud. Après nous avoir écoutés, il nous a aidés, et on a bloqué les grilles qui donnent sur le quai du Rhône pendant un mois « , confie-t-il.
Des propos qu’il avait déjà développés en novembre 2013, lors de la 1ere journée d’études-séminaire sur la CFDT en mai 1968 tenue à l’Institut d’études politiques de Lyon.
La visite amicale de deux postiers CFDT à l’ancien secrétaire général de la CGT était bien sûr amicale. Mais elle avait aussi pour objet de préparer l’intervention du syndicaliste dans le cadre du colloque que la CFDT Auvergne-Rhône-Alpes prépare pour les 21 et 22 mars 2018 en coopération avec l’Université de Lyon.
Les relations CGT-CFDT
Après Henri Krasucki, et avant Bernard Thibault, à qui il a mis le pied à l’étrier, Louis Viannet a impulsé un vent de réforme au sein de celle qui était alors la première organisation syndicale de salariés en France.
Comme membre de la Comité exécutive puis du bureau confédéral de la CGT, il va suivre de près les relations entre CGT et CFDT, et leurs secrétaires généraux, Georges Séguy et Henri Krasucki, et leurs homologues Edmond Maire et Jean Kaspar. Lui-même va ferrailler avec Nicole Notat, devenue secrétaire générale de la CFDT en 1992.
Le 8 août 2017, Louis Viannet est revenu brièvement sur les rapports entre les deux centrales syndicales.
CGT et Parti communiste français : une indépendance nécessaire
Louis Viannet a adhéré au Parti communiste français depuis 1953. Une démarche qu’il a faite parallèlement à son adhésion syndicale. Il est resté fidèle toute sa vie à ces deux organisations.
Mais, dans le même mouvement, où il a conduit la CGT a quitté la Fédération syndicale mondiale composée essentiellement de syndicats de pays communistes, il a entrepris la démarche d’adhésion de la CGT à la Confédération européenne des syndicats. De la même manière, le vent du changement a soufflé dans les rapports entre CGT et Parti communiste français (PCF). Le rôle de courroie de transmission, propre à la doctrine léniniste, a cédé la place à l’indépendance respectueuse telle que l’avait voulu les syndicalistes CGT en 1906 en rédigeant la Charte d’Amiens, lors de leur 9e congrès.
Aussi il est intéressant d’entendre Louis Viannet évoquer cette rupture du cordon ombilical entre la CGT et le PCF en 1996.
1968-2017 : analyse d’un parcours
En un demi-siècle, la société française et le monde ont extraordinairement changé. Le syndicalisme s’est adapté à la mondialisation économique dans un contexte où les inégalités ont continué à se creuser. Dans le même temps, les couches de salariés se sont modifiées, la part des employé.e.s dans le secteur tertiaire augmentant. Avec l’arrivée d’une nouvelle génération née dans les années soixante-dix/quatre-vingt, les rapports au mouvement social se sont modifiés.
Même si elle a été moins réactive que la CFDT, la CGT a aussi évolué, d’autant plus poussée ces dernières années par la révolution numérique et la crise écologique. Louis Viannet revient sur ce qu’ont été les points forts, mais aussi les manquent de la centrale la plus ancienne durant les 50 ans qui nous séparent de 1968, perçue comme une année-charnière.
Un colloque pour évaluer un demi-siècle de syndicalisme dans la région Auvergne-Rhône-Alpes aura lieu les 21 et 22 mars 2018 à l’Université de Lyon. Cette analyse sera développée au fil de l’histoire de la CFDT dans la seconde région française, étudiée dans la complexité de ses thèmes d’action et de ses relations avec son environnement social et politique. A ce titre, on retrouvera les entretiens audiovisuels avec Louis Viannet.
témoignages qui prennent aujourd’hui encore plus de valeur, et qui deviennent un marceau de l’ Histoire du Mouvement Ouvrier. Ces témoignages méritent une large diffusion encore aujourd’hui car ils laissent espérer un vrai changement de Société, et comme nous le disions quelques années auparavant « LE COMBAT CONTINUE »