Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste honoraire, correspondant du Courrier de Genève, carte de presse 49272
Voilà une dizaine d’années que je n’étais pas allé à la trappe de Chambarand, une petite abbaye située en bordure d’une forêt dans la commune dauphinoise de Roybon. A quelques kilomètres de là, sur le même territoire isérois, des écologistes se sont battus bec et ongle contre le projet de Centers Parc du groupe Pierre et vacances, qui a le soutien de la population. Comme à Sivens, une Zone à défendre (Zad) s’est implantée l’an passé pour faire pièce au projet touristique, et a été démontée manu militari il y a quelques jours. Profitant de la quiétude de la forêt, une trappe, communauté religieuse dépendant de l’ordre cistercien, de moines tout d’abord et de moniales ensuite, s’est établi depuis bientôt un siècle et demi offrant un havre de paix, de réflexion et de méditation. Voyage, voyage…
3h58 en ce lundi 29 juin. Il fait nuit noire dans la cour, pas un cri d’oiseaux ne retentit. Au lointain, du côté de l’Est, une frêle lueur semble poindre. Le ciel est parsemé d’étoiles et sur le gravier quelques pas crissent…
Les deux derniers jours de juin débutent tôt, comme à l’habitude pour les trappistines de l’abbaye de Chambarand. Deux moniales lancent les cloches, cordes en main s’il vous plait, et l’office de Vigiles, le premier de la journée peut débuter. Echos sonores recueillis par Jean-François Cullafroz
Le premier des sept rendez-vous priants de la journée s’est terminé. Dehors, il est cinq heures et le jour s’est levé. L’église, qui abritait il y a quelques instants une trentaine de moniales, revivra à nouveau deux heures plus tard pour l’office des Laudes, et la messe qui suivra à huit heures et demi.
Sur le parking qui borde l’abbaye une voiture affiche clairement son soutien au Parc Centers, une bulle tropicale dans une forêt de feuillus et en pleine zone humide propice à la biodiversité. Autant dire qu’après l’échec des écologistes devant le Conseil d’état, c’est aujourd’hui vers le tribunal de Grenoble qu’ils tournent leurs regards.
Il y a quelques jours, le pape François publiait Laudato si, une lettre-encyclique appelant au respect de la nature. Par essence et dans la tradition, monastères et abbayes sont ouverts aux préoccupations du monde et accueillent tous ceux qui se présentent.
A Chambarand, on pratique un accueil large et respectueux. Marie-Hélène est une jeune retraitée. Après une vie professionnelle parisienne bien remplie, elle aspire au calme. Même sans être très assidu aux cinq prières quotidiennes, la Trappe est aussi un lieu propice au lâcher-prise. Nous avons rencontré cette Bourguignonne dans le patio de l’abbaye. Elle témoigne sobrement au micro de Jean-François Cullafroz.
Habitant de Mâcon, elle ne manquera pas de prolonger ce contact avec la vie monastique dans des lieux spirituels de la région comme le carmel de Mazille ou la communauté œcuménique de Taizé.