Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste carte de presse 49 272
Le bureau de tabac-presse d’Ampuis (Rhône) est l’un des 27 000 points de diffusion de la presse sur le territoire français. Plusieurs centaines de journaux quotidiens, hebdomadaires, mensuels, de magazines et de revues spécialisées sont proposées au public par les dépositaires de presse. Là est la force de la démocratie. Là est l’importance de la liberté d’expression. Là est la richesse d’une presse pluraliste et diversifiée.
Après les dix-sept assassinats de la semaine passée, et les meurtres qui ont touché de plein fouet la rédaction de Charlie Hebdo, la reparution de cet hebdo satirique était indispensable. C’est le tour de force des « survivants », qui ont pris la suite de Charb, Cabu, Honoré, Tignous, Elsa Cayat et Bernard Maris. Grâce à Libé qui les a hébergé, au Monde qui a fourni les ordinateurs, à France Télé, Radio France et bien d’autres, le « canard » est sorti des rotos à temps, et ce mercredi matin, on se le disputait. De même que le Canard enchaîné ou Siné Mensuel qui avait commis une édition spéciale.
Trois millions d’exemplaires dans un premier temps diffusé dans près de 30 pays, un tirage exceptionnel pour un journal au bord du dépôt de bilan et qui en diffusait jusqu’alors à 70 000 par semaine. 700 000 « papiers » ont été vendus en quelques heures et parfois moins. « J’en vends d’habitude 2, ce matin, mon centre de presse m’en a fourni 30. J’ai ouvert à 6 heures du mat’ et 5 minutes plus tard, tout était parti », témoigne Estelle dépositaire à Ampuis, une commune rurale rhodanienne de près de 3 000 habitants.
Son associé Xavier Albert, dans le métier depuis deux ans est tout aussi étonné, même si cet enthousiasme était prévisible. Il témoigne de cet engouement au micro de François Dalla-Riva.
Depuis les assassinats parisiens les 7, 8 et 9 janvier, la vente des journaux a connu un boum extraordinaire. il a souligné la nécessité d’un réseau de marchands de journaux proches de la population et en nombre, même si la presse écrite voit ses ventes baisser.. Or, les perspectives qui étaient annoncées concernant le nombre de points de vente, et le statut qui est fait aux dépositaires de presse, mettent en péril leur existence. Qu’en pense un buraliste qui fait aussi un gros effort pour mettre en avant la presse et qui est un passionné de journaux ? Comment voit-il le rôle des journalistes dans la société Réponse avec Xavier Albert, marchand de journaux à Ampuis, une petite communauté rurale de la vallée du Rhône, au sud de la métropole lyonnaise. Propos recueillis par François Dalla-Riva.
Il est maintenant nécessaire que la dynamique qui vient d’être relancé trouve un prolongement par des ventes au numéro, par des abonnements de journaux papiers ou de leurs éditions numériques, voire même pour des médias numériques purement et simplement. il appartient aussi aux responsables des rédactions de permettre aux journalistes, y compris en presse locale et régionale, d’enquêter. même quand cela peut déranger les pouvoirs de toutes natures qui sont en place. Reste alors aussi aux journalistes à mener avec courage, détermination, constance, pugnacité et sans complaisance, de faire leur » job ».
A l’Etat aussi de permettre aux journalistes et aux lanceurs d’alerte de mener à bien leur mission d’information, un impératif citoyen consubstantiel à la démocratie. Pour cela, la protection des sources doit être étendue, comme l’avait promis le candidat François Hollande. La discussion au Parlement d’un projet de loi préparée par Christiane Taubira, et largement discuté et amendé par la profession doit être mis à l’ordre du jour. Il est temps qu’il remonte des oubliettes où une main- (peu encline à voir les droits de la presse s’étendre)- l’a plongé.
Après l’appel du centenaire lancé en juillet dernier et une audience des syndicats de journalistes à l’Elysée, le statu quo du silence ne peut qu’être inquiétant. Une affaire à suivre de près. Nous y reviendrons.