Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272
Les événements de mai-juin 1968, à Lyon comme ailleurs ne sont pas nés de rien. Dans les mois et les années qui les ont précédés, la contestation était montante face à un pouvoir gaulliste autoritaire et à bout de souffle. Dans différentes parties du monde aussi, les populations se soulevaient. Contre le racisme et pour l’égalité des droits civiques aux Etats-Unis, contre la guerre du Vietnam un peu partout ailleurs… Ceux qui avaient écouté le pasteur Martin Luther King à Lyon le 29 mars 1966, ceux qui fredonnaient les airs de Léonard Cohen, Bob Dylan et Joan Baez, ressentaient instinctivement que le vieux monde était en train de craquer… Retour sur quelques événements lyonnais antérieurs à 1968 qui seront évoqués les 21 et 22 mars 2018 dans le Grand amphi de l’Université de Lyon par la CFDT Auvergne-Rhône-Alpes, et différentes universités et laboratoires de recherche. Rencontres avec deux acteurs de cette période.
1967 : comme dans d’autres régions françaises, les usines sont ici et là en ébullition. Certaines tournent encore à plein régime, le chômage n’atteint pas 400 000 personnes, mais dans les ateliers, on ne voit guère la couleur des augmentations de salaires, alors même que les cadences s’accélèrent et les conditions de travail se dégradent.
Dans la capitale des Gaules, des grèves chez Berliet, Rhône-Poulenc, Rhodiacéta…
Dans l’agglomération lyonnaise, trois bastions ouvriers sont secoués par des grèves : Berliet, entre Lyon, Vénissieux et Saint-Priest en mars 1967, mais aussi les usines du couloir de la chimie, et puis la Rhodiacéta en décembre, dans une solidarité exemplaire entre avec les usines de Lyon-Vaise et Besançon.
Forts de l‘accord national entre CFDT et CGT, les luttes se développent unitairement, même si les approches sont différentes, mais le respect des sensibilités est alors de mise.
Dans la rue, les ordonnances contre la Sécurité sociale préparées par le Premier ministre Georges Pompidou conduisent là aussi solidairement, syndicats de salariés (CFDT-CGT et Fédération de l’éducation nationale), syndicats familiaux comme la Confédération syndicale des familles (CSF) et les Association populaires familiales (CNAPF), et partis politiques de gauche : Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS), Partii communiste français (PCF), Parti socialiste unifié (PSU).
Madeleine Delessert était déjà permanente à l‘Union départementale CFDT, implantée alors au 12 de la rue Saint-Polycarpe au pied du quartier lyonnais de la Croix-Rousse. Cette assistante sociale, militante féministe convaincue, se souvient de cette période qui a conduit au soulèvement de mai-juin 1968.
A Lyon, les militant.e.s de l’Agel-Unef
Les étudiants de l’Unef sont aussi partie prenante des cortèges syndicaux, mais c’est aussi au sein des résidences universitaires que se développent leurs actions pour exiger des transformations notables, parmi lesquelles l’introduction de leur mixité.
Jean-Hugues Chauchat, membre de l’Association générale des étudiants de Lyon (Agel-Unef), étaient un des militants qui œuvraient pour ces avancée. C’est durant l’hiver 1967-1968 qu’il y a eu des mouvements dans la résidences pour supprimer le contrôle d’accès au résidences (jusque là, dans chaque bâtiment du Crous (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires), un concierge filtrait les entrées. Ainsi, sur le campus de la Doua (Villeurbanne) où il logeait, quand ses parents sont passés par Lyon pour le voir, le concierge a interdit à sa maman l’accès à sa chambre, et seul son père a pu rentrer.
Tout jeune marié, il a ensuite logé avec son épouse à la résidence André Allis, au Fort Saint-Irénée, sur les hauteurs de Lyon 5e, dans un petit studio du bâtiment réservé aux « ménages ». Là, ils ont nous participé à une manifestation joyeuse de démontage des serrures électriques permettant aux concierge de filtrer l’entrée dans les bâtiments. Les serrures ont été solennellement enterrées dans les jardins.
Des actions, relatées par le presse comme L’Express, où la dimension revendicative n’excluait pas l’aspect ludique et qui étaient développées par l’Unef (Agel), les Etudiants socialistes universitaires (PSU) et des membres de la Frul (Fédération des Résidences Universitaires de Lyon).
Il revient sur cette période, en jetant un regard rétrospectif sur le mouvement de ma-juin 1968 entre Rhône et Saône.
21-22 mars 2018 : un colloque sur la période 1968-2018
Les 21 et 22 mars 2018 dans le Grand amphi de l’Université de Lyon, la CFDT Auvergne-Rhône-Alpes organise un colloque en coopération avec différentes universités et centres de recherche. D’ores et déjà, des représentants des universités Lyon 2 et Lyon 3, les laboratoires Larhra et Triangle, et le Centre Max Weber figurent au sein du Comité scientifique de ce colloque.
Cette rencontre grand public a pour objet de revisiter un demi-siècle d’histoire sociale, politique et économique dans la seconde région française. Des universitaires et acteurs sociaux apporteront leurs réflexions sur différents grands thèmes qui ont émaillé cette période, et dialogueront avec le public, sous la houlette de jeunes militant.e.s.
L’entrée sera libre.
(à suivre)
Renseignements et inscriptions pour le repas et le livre qui sera édité à la suite du colloque : UTI CFDT Lyon-Rhône (Groupe de travail « CFDT en mai-juin 68 en Rhône-Alpes ») – 214 avenue Félix Faure – 69003 Lyon
Courriel : cfdt1968.2018@gmail.com