Par Jean-François Cullafroz-Dalla-Riva, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272, correspondant du Courrier (quotidien à Genève).
Le 21 février 1944, le soleil inondait la clairière du Mont-Valérien (Suresnes), où furent fusillés 80 résistants. Quatre-vingts ans plus tard, à Vienne (Isère), le 21 février 2024, c’est aussi sous le soleil qu’une centaine de personnes a rendu hommage à Mélinée et Missak Manouchian et leurs camarades communistes et résistant.e.s, membres des Francs-tireurs partisans de la Main d’œuvre immigrée. Dix heures avant la panthéonisation de ces héros, échos de cette commémoration dans la sous-préfecture iséroise où la population arménienne reste très présente.
A Vienne (Isère), entre le fleuve Rhône et la cathédrale Saint-Maurice, le square Manouchian était bien étroit pour la commémoration de Missak et Mélinée Manouchian, qui entreront au Panthéon à la fin de la journée du 21 février 2024.
Une centaine de personnes se pressaient autour du cadran solaire, face à la plaque commémorative, lorsque s’est élevée la sonnerie « Aux morts », en hommage aux résistants assassinés.
Avant d’être extraits de la prison de Fresnes où ils étaient détenus, les 23 résistants eurent le temps d’écrire une dernière lettre à leurs proches.
Avant le discours officiel du maire de Vienne, a d’abord été lue l’ultime lettre de Missak à son épouse Mélinée.
Puis est venu le moment officiel de l’hommage avec le discours de Thierry Kovacs. en s’adressant directement à lui, le maire de Vienne a retracé le parcours de l’apatride Missak Manouchian, depuis son départ de Turquie suite au génocide de 1915.
Un résistant FTP de la MOI membre du Parti communiste français
L’arrivée en France de cet orphelin a été détaillé avec ses capacités intellectuelles, son œuvre de poète et traducteur des poètes français Victor Hugo et Charles Baudelaire et son engagement militant avec les FTP-MOI.
Dans son propos de remerciement, le président de Vienne-Condrieu-Agglomération a rappelé L’Affiche rouge, les qualités de ce « français de cœur et de sang » et situé son entrée au Panthéon avec son épouse Mélinée, dans la foulée d’autres héros résistants : Jean Moulin, Félix Éboué, René Cassin, Jean Zay, Geneviève De Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion…
Mais jamais il n’a été question de l’appartenance de Missak Manouchian au Parti communiste français.
Nariné Nicolian, consule générale d’Arménie à Lyon participait à cette célébration et a dévoilé la plaque dédiée à Missak Manouchian.
A l’issue de l’hommage, elle a confié son émotion extrême.
La communauté arménienne viennoise était largement représentée pour cette reconnaissance officielle de Mélinée et Missak Manouchian.
Au nombre des présents, Robert Hadjénian, diacre de la paroisse apostolique arménienne, était visiblement très ému. Son père était né à Smyrne (aujourd’hui Izmir) et sa maman à Adana (en arménien Ադանա ), et lui-même à Marseille.
Il témoigne de ses sentiments.
Des amis des arméniens et de l’Arménie s’étaient aussi associés à cet hommage au couple Manouchian et à leurs ami.e.s FTP-MOI.
Dominique Romet est dans ce cas. Membre actif de la Maison de la culture arménienne, elle explique les raisons de sa présence.
Pour cette viennoise, l’engagement des Manouchian reste d’actualité, et comme elle l’a fait pour eux, la France doit rester une terre d’accueil pour les immigrés, réfugiés et étrangers en général.
Cet hommage s’est conclu par le chant des patriotes arméniens interprété par Shushan Arakélian cheffe du chœur Gomidas de la Maison de la culture arménienne et de la chorale de la paroisse apostolique arménienne de Vienne.
Nous aurons l’occasion d’y revenir dans notre prochain article et de donner la parole à cette artiste musicienne et artiste lyrique.
(à suivre)
Notre prochain article :
Manouchian : Après le 21 février 2024 (4) : la transmission de la mémoire et la diffusion de la culture