Le Creusot : les Mittal aux aguets

Posté le par dans Pris sur le vif

Industeel, filiale d’Arcelor-Mittal en Saône-et-Loire, a beau être à 380 kilomètres de Florange, les 900 salariés de cette usine d’aciers spéciaux sont inquiets quant à leur avenir. L’accord passé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault entre l’Etat et le milliardaire indien Mittal sur la destinée des hauts fourneaux lorrains les a laissés dans le doute. Quant au refus de la nationalisation, c’est la cerise sur le gâteau, d’autant que la participation provisoire de l’Etat avait été soutenue par le ministre Arnaud Montebourg, l’homme politique fort du département. Les syndicats partagent les craintes des salariés. Exemple du côté de la CGT et de son délégué syndical Sébastien Gautheron. Interview à la suite de cet article.

« Le gouvernement nous a lâchés », c’est en résumé ce que pensent les responsables CGT de l’usine Industeel du Creusot (Saône-et-Loire), un des trois sites français de l’entreprise franco-luxembourgeoise du même nom, elle-même filiale du groupe international Arcelor-Mittal qui compte près de 20 000 salariés en France. Dans le local de l’union locale CGT, sur le site de la maison des associations, rue St Henri, sur les hauts du Creusot, les militants CGT présents expriment leur rancœur. « Où sont les engagements de notre président qui est venu ici ? », s’interroge l’un. Et un autre de rappeler : « Pourtant, Montebourg connaît bien sa région. Il était là en juillet 2008 avec Mittal et Sarkozy quand le PDG indien est venu visiter l’usine ».

Au Creusot, l’acier dont la destinée était liée à celle du charbon des mines voisines, est une vieille affaire : la famille Schneider, dont le musée-château local de la Verrerie rappelle le parcours, Creusot-Loire, nationalisé lors du premier septennat du président socialiste François Mitterrand, et plus récemment le rachat par Mittal… Les salariés de cette petite agglomération bourguignonne ont vécu à l’unisson du reste de la sidérurgie française : la crise de 1984, la chute des vallées lorraines, les aléas d’Usinor-Sacilor… Ici, Industeel, qui vend environ 80 000 tonnes d’aciers très spéciaux chaque année, a un long savoir-faire qui en fait un champion des blindages pour l’armée, des crémaillères pour les plates-formes de forage pétrolier ou des lingots (coque enfermant le combustible nucléaire) pour les centrales EDF. « On pourrait vendre au moins 120 000 tonnes, mais la direction refuse des marchés qu’elle estime pas assez bien payés. Pour elle, c’est d’abord le cash qui compte », poursuit un militant syndical. En foi de quoi, les salariés de cette aciérie électrique subissent une semaine de chômage partiel par mois depuis un trimestre.

Prudence, vigilance et espoir…

Autant dire que l’on observe avec prudence ce qui se passe du côté de Florange. Tout en dénonçant un vent de panique, les syndicalistes restent vigilants. Ils regardent de près les carnets de commandes des trois usines françaises d’Industeel, dont leurs deux collègues du département de la Loire : St Chamond et Chateauneuf. Leurs compétences en matière d’installations en haute mer pourraient être utilisées pour la réalisation des plates-formes d’éoliennes maritimes, et la proximité avec Areva, tant sur le plan industriel que géographique (les usines creusotines sont voisines), peuvent être un atout, mais rien n’est définitivement gravé dans le marbre. « Quand on sait que Lakshmi Mittal est avant tout un financier et pas un industriel, on ne peut qu’être réservé sur notre avenir », conclut un des militants CGT, qui espère bien qu’Arnaud Montebourg, leader socialiste du département ne les lâchera pas.

Mais des jeunes syndicalistes très inquiets sur leur avenir (« aurons-nous une retraite, et à quel âge ? ») font remarquer qu’aujourd’hui, parmi les salariés, c’est un peu chacun pour soi. Et un autre complète en soulignant que la CGT n’est pas l’organisation majoritaire dans l’usine, et que « l’unité d’action syndicale a du plomb dans l’aile ».

Pour sa part, Sébastien Gautheron, délégué syndical d’Industeel, exprime sans langue de bois, les espoirs et les craintes dela CGT. Interview ci-après.

Propos recueillis par Jean-François Cullafroz-Dalla Riva.

 

 

http://youtu.be/VQVhEtvTLHI

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