Après l’assassinat de Samuel Paty : sursaut et réflexion sont nécessaires (1)

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Par Jean-François Cullafroz-Dalla Riva, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272, correspondant du Courrier (quotidien à Genève)

En presse régionale (Le Dauphiné libéré), comme en presse nationale (de La Croix à L’Humanité, en passant par Libération), l’hommage au professeur Samuel Paty a été unanime et à l’unisson de la cérémonie de la Sorbonne ( © Pierre Nouvelle ).

J’ai enseigné en école primaire, collège et université, puis je fais profession de journaliste. Comme la plupart, j’ai été très sensible à l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire de Conflans-Sainte-Honorine par un jeune terroriste islamiste. Mon émotion reste vive, et j’ai choisi de publier des réactions de collègues de l’enseignement …

Depuis des semaines, et encore plus à l’occasion du procès des assassins de Charlie Hebdo et de l’Hyper cacher, les journalistes de l’hebdomadaire n’ont cessé leurs mises en garde vis à vis de l’islamisme terroriste ( © Pierre Nouvelle ).

Deux ex-professeurs, habitants de Saint-Priest (Rhône) ont été touchés par les propos de Robert Badinter sur France Inter mercredi 21 octobre. Ils les ont relayés auprès de leurs ami.e.s.

« C’est, encore une fois, le visage du terrorisme islamique, qui se montre à nous », se désole l’ex-ministre de la Justice de François Mitterrand. « En cette période de deuil national, je tiens à saluer la mémoire d’un homme qui est à sa manière pour moi un héros tranquille.

Dans le corps enseignant aujourd’hui, il y a des femmes et des hommes qui s’exposent pour nous, pour la République, qui tiennent bon les valeurs essentielles sans lesquelles la République n’existe plus, nous n’avons aucune chance de connaitre le bonheur de vivre dans un État de liberté. Ce sont eux les vrais combattants de la liberté. »

Révolte d’une enseignante d’arts plastiques

Une ex-enseignante de la banlieue lyonnaise, professeur d’arts plastiques et elle-même artiste livre ses sentiments.

 » L’automne en deuil.. Qui frappe et se déchaîne… « Touche pas à mon prof » « je suis en. saignante », des pancartes et des applaudissements.. L’effroi et la résistance.

Venus en famille place Bellecour, nous avons retrouvé des amis place, un de mes anciens élèves, le proviseur et un prof d’histoire du collège Dargent. Nous étions face à l’ignominie, quelle conscience, quels travaux devant nous.. Dans le pays des droits de l’homme et du citoyen.. Liberté égalité fraternité.


Voilà un lundi d’automne comme on ne l’aurait jamais imaginé… Le virus pernicieux et vaillant engluant nos pensées quand on voudrait être encore actifs… On ne sait plus..
L’essentiel, la mission d’instruire d’élever.. Victor Hugo disait un enseignant « monte pierre après pierre une maison humaine »

Femmes contre les intégrismes depuis un quart de siècle

Des représentantes de l’association rhodanienne Femmes contre les intégrismes était présente lors du rassemblement lyonnais en hommage à Samuel Paty
( ©DR/Femmes contre les intégrismes ).

« C’est la pensée qu’on assassine ! » synthétise l’association Femmes contre les intégrismes

« En s’attaquant de la façon la plus barbare -la décapitation- à un enseignant, symbole de la formation de la pensée critique, l’obscurantisme a franchi un cap dans le travail de sape de nos libertés, le vendredi 16 octobre 2020.

Cette stratégie de la terreur nous rappelle celle que combattaient il y a vingt-cinq ans nos ami-e-s d’Algérie, résistant à l’intégrisme islamique.

Depuis, Femmes contre les intégrismes dénonce inlassablement l’installation insidieuse des idéologies religieuses basées sur la primauté de lois divines liberticides, ainsi que leurs soutiens coupables à l’intérieur du système politique et médiatique. 

Pour que le totalitarisme ne l’emporte pas, il est temps que les pouvoirs publics entendent les associations qui prônent le respect des personnes quelles que soient leurs opinions et leurs croyances, dans l’observation des lois et des libertés publiques, en faisant de la laïcité et du savoir le ciment de la société. 

Toutes nos pensées émues vont à la famille de la victime et au courageux corps enseignant.

 » Si tu parles, tu meurs. Si tu te tais, tu meurs. Alors, dis et meurs. »

Tahar Djaout, écrivain et journaliste mort des suites d’un attentat à Alger en 1993. Il fut l’un des premiers intellectuels victimes de la décennie de terreur en Algérie. »

Pour la journaliste-dessinatrice Coco, ce sont bien toutes les religions, et en particulier celle du monothéisme qui doivent être interrogées sur leurs pratiques intégristes ( © DR ).

A l’adresse des intervenants en milieu scolaire

Pour sa part, la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) a publié un message à ses militants et intervenants en milieu scolaire. Voici les propos de Mario Stasi et Bernard Ravet, respectivement président et vice-président de la Licra.

Chers amis,

Nous sommes sous le choc. Samuel Paty, enseignant de la République est mort, sauvagement exécuté, décapité par un terroriste islamiste, au motif qu’il avait enseigné l’éducation civique et la liberté d’expression à ses élèves, les caricatures de Charlie Hebdo à l’appui. En 2012, déjà, un enseignant, Jonathan Sandler, était assassiné dans son école à Toulouse par un islamiste, parce qu’il était juif. 

Ce drame est une catastrophe autant qu’il doit être, au plus profond de chacun d’entre nous, dans notre cœur, une raison de nous battre, de nous engager, de nous lever pour dire que jamais l’obscurantisme n’aura le dernier mot et proclamer que, toujours, l’universalisme, les Lumières et notre insatiable amour de la liberté doivent l’emporter.

Sur le terrain, lors de vos interventions scolaires, vous êtes en première ligne, face aux élèves, aux cotés des enseignants. Votre travail est aujourd’hui plus que jamais essentiel. Soyez-en remerciés chaleureusement.

Le climat actuel est difficile et nous mesurons combien votre tâche est, et sera, de plus en plus difficile. 

Pour l’heure, au nom de la Licra, nous vous demandons de prendre contact avec les chefs d’établissements et les enseignants avec lesquels vous travaillez déjà pour leur dire notre soutien, notre solidarité, notre fraternité mais aussi pour leur proposer d’avancer main dans la main dans l’accompagnement du traitement des sujets qui nous animent et nous préoccupent.

Il importe de bâtir avec eux une stratégie commune avec l’Éducation Nationale pour traiter des sujets liés à la liberté d’expression, à la laïcité, à la liberté absolue de conscience, aux valeurs de la République. Nous avons le devoir d’aller au bout des choses, de ne pas céder à l’auto-censure et au renoncement.

Par ailleurs, nous allons préparer avec plusieurs experts de ces questions des supports pédagogiques qui seront utiles à vos interventions et qui, nous l’espérons, permettront de convaincre davantage les élèves que vous rencontrez. Enfin, nous devrons pleinement intégrer aux interventions de la Licra la question des usages des réseaux sociaux, des pratiques liées au harcèlement et qui peuvent conduire au drame de Conflans.

Vous tâche est rude. Nous en avons pleinement conscience. Nous sommes à vos côtés pour vous aider à y pourvoir au mieux. Dans le contexte actuel, nous vous appelons aussi à la vigilance et nous vous demandons de nous signaler tout incident, tout élément qui permettrait de penser que votre intervention a pu conduire à des réactions inhabituelles, violentes ou à des propos susceptibles de donner lieu à des passages à l’acte. 

Certains de votre engagement et de votre disponibilité, nous vous prions de croire en notre détermination républicaine, 

(à suivre)

Notre prochain article : Après l’assassinat de Samuel Paty : des journalistes révoltés (2)

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