Gérard Buétas : A Lyon, un journaliste rigoureux et de talent nous as quittés

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Avec son humour et son sourire, le Perpignanais, fan d’athlétisme, de rugby et de foot, a su faire souche et se faire aimer en terre rhodanienne (© DR/Annie Buétas).

Par François Dalla-Riva, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272, correspondant du Courrier (quotidien à Genève).

Une vingtaine de journalistes présents à Lyon en cette fin juillet a tenu à s’associer à l’hommage rendu à Gérard Buétas : aux côtés d’Annie Buétas, on trouve de gauche à droite, Jean-François Cullafroz, Jean-Pierre Vacher, Brigitte Coquard, Michel Godet, Claude Cordier, Alain Barrelle, Robert Pierron, Daniel Navrot, Jeanine Paloulian, Catherine Clancy, Philippe Juste, Jean-Jacques Bozonnet, Gérard Guyennon, et Nicolas Cianfarani (© Pierre Nouvelle).

Lundi 29 juillet 2024, au crématorium du cimetière lyonnais de la Guillotière, avaient lieu les obsèques de Gérard Buétas, un journaliste qui a marqué la presse lyonnaise pendant quarante ans. A cette occasion, devant sa famille et dans une salle Victor Augagneur archi-comble, ses collègues lui ont rendu un émouvant et vibrant hommage. Retour sur cet événement.

Vendredi 26 juillet 2024, le quotidien Le Progrès a salué la mémoire de Gérard Buétas, journaliste pendant dix ans le groupe de presse, entre l’agence Aigles et le journal lyonnais
(© DR/Le Progrès/Pierre Nouvelle).

D’abord, bien naturellement, après quelques mesures de l’opéra Pierre et le loup, Annie Buétas, qui a été son épouse, a rappelé les bons moments familiaux, de son départ de Perpignan, à la suite de décès de son papa, à son éloignement de son entourage, contraint par une maladie de Lyme de plus en plus handicapante.

Avant une lecture d’un passage du Petit prince, ses filles, Agnès, Juliette et Élise, ont, elles-aussi, témoigné de leur cheminement avec leur papa, jusqu’à ses derniers instants dans un Ehpad lyonnais, où il a décidé de rompre avec la souffrance.

Jean-Claude Barral, un cousin, avec qui Gérard Buétas a cheminé pendant dix ans sur le chemin de Compostelle, a ensuite témoigné d’une amitié qui s’est renforcée au fil de 1 700 kilomètres entre le Puy-en-Velay et la cité de Galice.

Puis, Catherine Clancy, Alain Eck et Jean-François Cullafroz ont offert l’hommage de la profession journalistique lyonnaise.

L’hommage des collègues

 » Gérard, Gégé, Bubu, Ti Gibus

C’est ainsi qu’on te nommait entre consœurs et confrères, autant de prénoms amicaux qui ont varié selon les médias où nous t’avons rencontré.

C’est au présent que nous nous adressons à toi, car tant que ton souvenir ne s’effacera pas de nos mémoires n’oublieront pas, tu seras toujours là présent.

C’est aussi à vous que nous nous adressons, Annie, qui a été son épouse, Agnès, Juliette et Elise, ses filles, Romain et Florian, ses gendres, c’est pour vous aussi Jeanne, Matthias, Gabin et Quentin, pour que vous sachiez ce que votre grand-père nous a laissé.

Profession sous le choc et messages d’amitié en nombre

Au nom de nos collègues de la presse lyonnaise, nous voulons vous dire qui est pour nous Gérard. Et pour témoigner, nous pourrions être ici plus que dans les sports qu’il a pratiqués : 6 comme au volley, 12 comme au foot, 13 comme dans l’équipe de rugby de ton père, ou à 15, quand tu es passé par les équipes de rugby, entre Villefranche-sur-Saône à Lyon. Sport que tu as exercé jusque chez les vétérans à 50 ans passés.

Dix ans pour accomplir avec son cousin le voyage de Compostelle ont constitué une longue démarche qui a alimenté la réflexion de Gérard Buétas (© DR/Annie Buétas).

Mardi passé, l’annonce de ce nouveau combat que tu as livré au terme de quinze ans de maladie, nous a été livrée par Alain Eck et Marie-Martine Chambard. Depuis ce nouveau passage que tu as décidé, et après la publication d’un papier dans l’édition de vendredi du Progrès, les messages d’amitié se sont multipliés.

De la part d’Alain Barrelle, président de l’Association des journalistes professionnels (l’AJP), qui était avec toi au sein de l’agence Aigles, et puis d’autres ami.e.s lyonnais ou caladois, tels Jean-Michel Aulas et Jean-Jacques Bozonnet présents cet après-midi, eux tes condisciples du lycée Claude Bernard. Message reçu d’ami.e.s présent.e.s dans le Rhône comme Jean-Pierre Vacher, représentant le Club de la presse de Lyon, ou ami.e.s en vacances. Message aussi d’ami.e.s éloigné.e.s de Lyon comme Michel Delberghe, Pierrick Eberhard, Jean Etevenaux, Mariette Grande, Nadjette Maouche, Robert Marmoz, Serge Tonioni, Vincent Rocken

« J’ai eu l’occasion de travailler un peu aux côtés de Gérard au tout début de ma carrière, lors d’un stage au Monde Rhône-Alpes, et je garde le souvenir d’une personne pleine d’humour », témoigne Véronique Vigne-Lepage. »

Au Monde Rhône-Alpes pendant neuf ans…

 » Depuis Nîmes, Bernard Élie, assisté de son épouse Cécile, poursuit dans la même veine.

Sur cette photo figure une grande partie de l’équipe du Monde Rhône-Alpes entre 1986 et 1996
(© DR/Bernard Elie).

 
En bas de gauche à droite : Gérard Buétas, Jean Louis Saux, Karen Pineau (responsable de la publicité, la secrétaire du rédacteur en chef, puis Raphaëlle Rivais.
  Au second rang, de gauche à droite : Pierre Moulinier, André Griffon (correspondant Ardèche), Bernadette Bost, Bernard Bolze , Cécile Elie, Jean Jacques Lerrant ,Jacques Pintado (responsable des ventes pour la région RA), Bruno Caussé, Robert Belleret, Gérard Clavairoly.
    

« Gérard a été l’un des piliers de l’équipe rédactionnelle du Monde Rhône-Alpes dont j’ai assuré la direction pendant neuf ans, dit Bernard Elie. Aussi, puis-je témoigner de ses qualités multiples Professionnelles naturellement, avec un souci pointilleux de s’assurer du bien-fondé des informations, économiques principalement, qu’il proposait aux lecteurs.

Mais le journaliste très professionnel se doublait d’un homme à l’humanité solide, ce qui lui permettait de donner un avis sur les papiers bien tournés ou, en revanche, sur certains dérapages de ses consœurs ou confrères. Une contribution toujours bienveillante destinée à nourrir l’ambiance rédactionnelle. »

Qu’il en soit vivement remercié. »

Gérard Clavairoly, absent de Lyon, ajoute : « J’ai été très affecté par l’annonce de la mort de Gérard, un confrère syndicaliste qui a beaucoup compté pour moi dans les années 80 au Progrès. »

Chantal Féminier-Lemanessier, longtemps représentante du Syndicat national des journalistes, corrobore :

« J’ai connu Gérard quand il était au service éco du Progrès avec Gérard Guyennon. Moi-même j’étais à Dernière Heure Lyonnaise où je bossais la nuit. Puis nous avons travaillé ensemble à la rédaction locale du Progrès, rue Ferrandière. Je crois que nous avons quitté le journal au même moment en 1986 à l’arrivée d’Hersant. Il a intégré Le Monde et j’ai créé l’agence Pleins Titres avec Jean Périlhon. Je ne l’ai jamais perdu de vue par la suite. Il a même fait quelques piges pour Pleins Titres que je dirigeais.

C’était un excellent confrère, avec un grand esprit de synthèse. Charmant, d’une grande correction, il était toujours prêt à donner un conseil, un coup de main. Ce fut le cas pour moi lorsque nous avons couvert ensemble un congrès de la Mutualité française. Je sais que la vie l’a rendu un peu amer par la suite mais je lui ai toujours gardé mon amitié. »

Michel Deprost, qui ne peut-être des nôtres, poursuit : « J’ai connu Gérard, après mon arrivée au Progrès et après son départ du journal. Puis dans le cadre de la CFDT. J’ai toujours trouvé en lui un collègue indépendant, sensible, très sensible, aux questions sociales, très exigeant. »

Et Richard Schittly conclut : « Gérard reste profondément inscrit dans la mémoire du journalisme lyonnais. »

Gérard Buétas a honoré sa carte de presse par la qualité de ses « papiers », son indépendance, son honnêteté et sa rigueur (©DR/CCIJP/Pierre Nouvelle).

 » Que dire de plus ? De tes débuts, au sein de l’Agence générale d’informations économiques et sociales (Aigles) de 1975 à 1980, au Tout Lyon jusqu’en 2013, en passant par Le Progrès entre 1981 et 1985. Rappeler l’hebdo Direct créé par nos amis Daniel Navrot et Bernard Bolze en 1985, le quotidien Le Monde entre 1987 et 1996, la lettre Prospective Rhône-Alpes encore avec Daniel et Bernard Lachaise, entre 1998 et 1999, Direct Eco en 2000, Régional Press Agency en 2001 et 2002, Econodia Rhône-Alpes de 2005 à 2007. De tous ces médias, il n’y a que des souvenirs positifs qui émergent.

Souvent, quand quelqu’un nous quitte, on ne livre que de bons souvenirs. Mais, en la circonstance, pour toi, Gérard, rien de factice, pas de chichis ni de faussetés. Fidèle à ta pratique sportive et à ton caractère catalan parfois cash, nous pouvons témoigner de ton amitié, dont j’ai bénéficié professionnellement au Progrès d’abord, entre la grande salle de Bellecordière et le bureau éco de Chassieu. Et puis ensuite à Direct, et aussi au Club de la presse de Lyon. « 

Un engagement syndical soutenu et permanent

 » Dans les traces de ton grand-père, l’ouvrier typographe perpignanais, Gérard, tu as été un militant CFDT, sans faille, de ta responsabilité de délégué du personnel, à celle de membre du conseil national du Syndicat des journalistes français CFDT.

Comme beaucoup d’autres, nous avons personnellement bénéficié de ton engagement, en particulier pour l’intégration des pigistes au Progrès). Pour d’autres, tu les as assistés en Justice avec l’assistance de maitre Philippe Lejard. C’était l’époque où Jean-Charles Lignel, PDG du Progrès, entendait s’affranchir des règles du droit social.

Dans ce contexte, avec Catherine Clancy et Jean Périlhon, et dans le cadre de l’intersyndicale CFDT-SNJ, tu as réussi à faire mettre en grève le syndicat du livre CGT. Pour toi, la solidarité dépassait les frontières catégorielles qui marquait notre profession. Ainsi, avec la section CFDT, tu t’es mobilisé pour les clavistes (la plupart femmes) qui saisissaient la copie des journalistes et correspondants.

Et cette détermination et ton sens de la justice se sont encore illustrés, lorsque tu as accepté que la CFDT te présente aux élections comme juge au Conseil des prudhommes de Lyon, où tu fus président de la section des cadres.

Avec celles et ceux qui avaient cru à un renouveau possible de la presse lyonnaise, « entre Le Monde, Libération et le New York Times », après les rapprochements entre Progrès et Dauphiné libéré, et avant le rachat des titres par l’ogre Robert Hersant, tu as cru dans l’information comme vecteur de démocratie. Nous avons vite déchanté car l’héritier du 6e arrondissement ne fut pas à la hauteur de la famille Brémond, celle qui avait dit non à Vichy et avait conduit le journal à ses saborder lors de l’arrivée des Allemands à Lyon le 11 novembre 1943.

Et comme un certain nombre, tu as quitté le navire après 1985…

Durant tout ce parcours sobrement rappelé, Gérard, tu n’as pas failli et tu as fièrement honoré ta carte de presse 36560. Avec constance et détermination, tu as défendu l’indépendance de notre profession et souligné en permanence le rôle irremplaçable de l’information et de la presse comme piliers de la démocratie. « 

Détermination et conviction auréolées d’un grand sourire et de beaucoup d’humour

 » Nous ne saurions conclure sans évoquer ton sourire, ton souci d’allier convivialité confraternelle et sport. On se souvient des matches de gala entre journalistes et personnalités politiques et économiques. On se souvient aussi que tu as dignement représenté le Rhône et notre profession au marathon de notre ville, et aussi ceux de Paris et de New York.

Pour tout cela, pour cette longue course de fond professionnelle, citoyenne et solidaire, Gérard, sois remercié ! « 

Voici le reportage vidéo de cet hommage filmé par Jeanne, la petite fille de Gérard Buétas.

Fidèle au souhait de Gérard Buétas, à l’issue des funérailles, a été effectuée une collecte de dons pour l’Association pour le droit de mourir dans la dignité.

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