Contournement de Lyon : la défaite annoncée de l’écologie ?

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Point de vue de Cyril Mathey et Roger Fréty, militants écologistes de Givors et Grigny

Samedi 26 novembre, 250 voitures ont bloqué la rocade entre Chasse et Vaulx-en velin. Motif de cette manifestation sur la rocade Sud de Lyon : protester contre de nouveaux projets autoroutiers concomitants au déclassement des autoroutes A6 et A7 dans la traversée de Lyon. Cette contestation s’effectuait aussi sur un terreau de mécontentement, après l’adoption du projet de l’A45 entre Lyon et Saint-Etienne et l’incertitude sur le contournement ferroviaire de Lyon avec le tracé du CFAL. Des membres d’Europe-Ecologie Les Verts étaient dans le cortège des opposants autoroutiers, mais ils portent un diagnostic sombre sur l’avenir. Une position élaborée dès décembre 2015, qui s’est affinée au fil des mois. Explication avec Cyril Mathey et Roger Fréty, auteurs de cette analyse de la situation.

Cyril Mathey et Roger Fréty : deux opposants aux projets autoroutiers et militants écologistes désabusés (© DR/Cyril Mathey).

Cyril Mathey et Roger Fréty : deux opposants aux projets autoroutiers et militants écologistes désabusés (© DR/Cyril Mathey).

 » Ne m’appelez plus contournements ! « , soulignait Roger Frety, militant EELV et élu de la commune de Grigny (Rhône). Et il poursuivait par l’analyse qui suit.

Depuis plus de 20 ans, contre les contournements autoroutiers Ouest (Col) et Est (Cel) de l’agglomération Lyonnaise, depuis plus de dix ans contre le tracé sud du contournement ferroviaire, je suis, à l’instar de beaucoup d’autres, un citoyen engagé contre ces projets.

Qu’ils soient routiers ou ferroviaires, ils n’ont de contournement que le nom. Leur objectif premier, aujourd’hui décelable comme la poutre dans l’œil, n’est pas de contourner l’agglomération lyonnaise, mais d’être les axes structurants de la mégapole lyonnaise en construction, celle qui à terme s’étendra sur tout le territoire de la Région urbaine lyonnaise (Rul), de Villefranche-en-Beaujolais au nord, jusqu’à Péage-de-Roussillon au Sud, de Saint-Etienne à l’Ouest à Villefontaine/Bourgoin-Jallieu à l’Est.

250 voitures et 500 manifestants sur la rocade Est de Lyon, mais pour atteindre quel objectif © Cyril Mathey). ?

250 voitures et 500 manifestants sur la rocade Est de Lyon, mais pour atteindre quel objectif (© Cyril Mathey) ?

Telle une fusée, cette future mégapole comporte deux étages: Le premier s’appelle Métropole de Lyon. Si cet étage est formellement opérationnel depuis le 1er janvier 2015, il est encore en période de rodage. Il lui faudra sans doute deux à trois ans pour donner pleinement sa mesure. Faire en sorte que tous les services hier du Grand Lyon et du Département se restructurent et ne fassent qu’un demande du temps.

Sous l’égide du Grand Lyon et du Pôle métropolitain

Le 2ème étage s’appelle Pôle métropolitain. Il est en cours de construction. Ce n’est encore qu’une association de collectivités volontaires. Sous l’égide, hier du Grand Lyon et de ses maîtres à penser (adeptes de la théorie de « l’économie d’archipel »), hier, la bande des quatre  (Grand Lyon plus la Société d’économie mixte – Saint-Etienne Métropole plus la Communauté d’Agglomération des Portes de l’Isère (Capi ) et Vienne-Agglo) est passée à six avec l’arrivée de la Communauté de communes de l’Est Lyonnais (CCEL) et de la Communauté d’Agglomération de Villefranche-en-Beaujolais-sur-Saône (CAVBS ).

C’est dans cette perspective qu’il faut repenser ces soi-disant contournements routiers, qui ne seront, avec l’A45, que les artères principales de  » cette grande métropole internationale capable de rivaliser avec Milan, Barcelone, Francfort « …

C'est dans le cadre de la Région urbaine de Lyon qu'il faut analyser les projets de contournements routiers et ferroviaires que présentent les élus de la métropole et des départements du Rhône et de l'Isère (© DR).

C’est dans le cadre de la Région urbaine de Lyon qu’il faut analyser les projets de contournements routiers et ferroviaires que présentent les élus de la métropole et des départements du Rhône et de l’Isère (© DR).

Les opposants aux projets autoroutiers de l’Est comme de l’Ouest doivent comprendre que dans cette perspective, ils auront, tout à la fois, le Cel et le Col. Loin de s’opposer entre eux, ils doivent au contraire faire cause commune.

Quant au CFAL (Contournement ferré de l’agglomération lyonnaise), son tracé sud tel que retenu à ce jour ne permettra pas un report massif des camions sur le rail. Au contraire, il favorisera les projets autoroutiers dits de contournement. En effet, il restera toujours suffisamment de camions en transit nord/sud pour les justifier.
Si, à l’Est, les opposants au tracé sud du CFAL, n’avaient pas voulu à ce jour se mêler des projets autoroutiers de l’Ouest (Col et A45), ils se retrouvent aujourd’hui en première ligne contre la menace imminente du bouclage du Cel. Il importe qu’à l’Ouest, toutes les associations de lutte contre le Col et l’A45, se réveille et fassent front au côté de ceux de l’Est. Il importe qu’au plus tôt, une coordination Est/Ouest se mette en place.

Si, à l’Ouest comme à l’Est, les populations refusent ce modèle de développement qui nous est imposé. Sinon, si on adhère à ce modèle, alors il faut en accepter les conséquences.
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Au fil des mois, nouvelle alerte en avril 2016

Pour la 1ère fois depuis toujours, les conditions pour la réalisation à terme de tous les projets autoroutiers de l’agglomération lyonnaise sont réunies avec :
la constitution de la Métropole ainsi que la constitution du pôle métropolitain, les deux allant de pair et modifiant profondément la situation qui prévalait jusqu’à lors. Leurs projets stratégiques, leurs poids politiques et leurs puissances de frappe changent tout, et en second lieu, la victoire aux régionales de la liste de Laurent Wauquiez.

Transports routiers et ferroviaires ont partie liée et les infrastructures qu'ils supposent aussi © Pierrer Nouvelle).

Transports routiers et ferroviaires ont partie liée et les infrastructures qu’ils supposent aussi (© Pierrer Nouvelle).

Cette nouvelle donne est dévastatrice pour les opposants de toujours aux autoroutes périurbaines. Non seulement, ceux-ci en arrivent à s’opposer entre eux (Est/Ouest) mais certains, (opposants à l’A45), au nom sans doute d’un réalisme « raisonnable », sont prêts à justifier et à approuver certains projets pour en refuser d’autres. Pour les opposants, cette stratégie est suicidaire. Le rouleau compresseur métromégapole, sa toile tissée depuis longtemps, va, les uns après les autres, au gré des opportunités, les imposer tous.

Condition sine qua non pour faire échec à cette déferlante, une écologie politique forte et unie sur les territoires concernés. Sauf qu’elle n’est ni forte ni unie sur le fond comme sur la stratégie. Le pire serait que le débat n’ait pas lieu. C’est l’objet de cette interpellation.

Notons que grâce aux militants EELV de la Loire (merci à eux), nous avons collectivement élaboré un tract dans le cadre de la riposte à l’initiative Wauquiez, ce qui nous a permis d’exister politiquement. Force est de constater qu’il ne se différenciait guère de celui des associations Sauvegarde des côteaux du Jarez et Sauvegarde des côteaux du Lyonnais. Ni il ne globalisait les projets sur la Région urbaine lyonnaise, ni il ne s’attaquait à la logique qui les commande.
5 avril à Givors, une mascarade cautionnée

Voici quelques éléments pour faire le tour de la question. Pour rappel: la région de Givors et le sud lyonnais, (pays Viennois et rive droite du Rhône) sont au cœur de toute la problématique des infrastructures autoroutières  : A45, Contournement Ouest de Lyon(Col) et contournement Est (CEL) et des infrastructures ferroviaires avec le CFAL (Contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise).

Une fois l'A45 entérinée et l'A6-A7 déclassées, quelle marge de manœuvre este-t-il pour les populations (© Pierre Nouvelle) ?

Une fois l’A45 entérinée et l’A6-A7 déclassées, quelle marge de manœuvre este-t-il pour les populations (© Pierre Nouvelle) ?

Concernant l’A45, des opposants, sous la conduite du maire de Givors drivé par la Métropole,sont  prêts à accepter le barreau sud du Col, la traversée du Rhône et le bouclage du Cel (achèvement de l’A432). Dans le même temps, des opposants dans la Loire qui se sentent peu concernés par le Col et ignorent le Cel et le CFAL

Du côté du CFAL, il y a des opposants au tracé sud par la plaine de l’Ozon et la rive de droite du Rhône. Jusqu’à aujourd’hui, inconséquents politiquement et stratégiquement, ils n’ont pas voulu entendre parler de la lutte contre les contournements autoroutiers sous le prétexte qu’il ne faut pas mélanger les deux.  Aujourd’hui, alors qu’il est bien tard, ils se réveillent timidement contre le bouclage du Cel en dénonçant le « tout pour l’Est » contre le « rien pour l’Ouest » (maire de Vénissieux en tête)…

Cyril Mathey et Roger Fréty : deux opposants aux projets autoroutiers et militants écologistes désabusés (© DR/Cyril Mathey).

Cyril Mathey et Roger Fréty : deux opposants aux projets autoroutiers et militants écologistes désabusés (© DR/Cyril Mathey).

Les dés sont jetés

Pour le Col,: dont toutes les cartes indiquent les barreaux nord (il est programmé) et sud (défendu par Gérard Collomb et, à sa manière, par Martial Passi). Il ne manquera plus, le moment venu, que de relier les deux…Enfin, en ce qui concerne le Cel, tout indique que, suite au déclassement de l’A6/A7 dans la traversée de Lyon, l’achèvement est programmé.

Pour éclairer ce dossier, les articles du quotidien Le Progrès du 8 avril 2016 concernant le déclassement soutenu sans vote au conseil municipal de Lyon, et la délibération du Conseil métropolitain du 21 septembre 2015 apportent les éléments nécessaires pour compléter les fondements de cette analyse. L’article de l’hebdomadaire Lyon Capitale du 21 septembre 2015 et un nouvel article du Progrès du 30 novembre complètent cette revue de presse édifiante.

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