Après le gaz de schiste, on parle ce jeudi de la possibilité d’extraire du gaz de houille, ce fameux grisou qui faisait jadis la terreur des mineurs et de leurs familles. Pour sa part, le projet Ulcos, toujours soutenu par le gouvernement, met en avant à Florange la possibilité de récupérer le gaz carbonique au sortir des hauts-fourneaux. Promis lors de la campagne présidentielle, le débat sur l’évolution de l’énergie à l’horizon 2020 reste donc dans l’actualité. Inauguré en septembre dernier, c’est la semaine passée qu’il a vraiment été ouvert Un séminaire gouvernemental s’est d’ailleurs tenu sur cette question. Avec en toile de fond, la question des infrastructures, des transports et en corollaire la protection de l’environnement et la santé des populations. En la matière, le public a encore du mal à faire valoir ses droits, comme le montre le récent jugement de la Cour d(appel de Chambéry au sujet de l’incinérateur de Gilly-sur-Isère.
Poser des jalons concrets pour l’avenir énergétique de la France figurait dans l’accord passé entre Martine Aubry et Cécile Duflot, le Parti socialiste (PS) et Europe-Ecologie les Verts (EELV), puis dans le programme des 60 engagements du candidat socialiste à l’élection présidentielle. Une fois élu, François Hollande a réuni les 14 et 15 septembre derniers une conférence environnementale qui a laissé place à un débat national sur la transition énergétique. Il s’est ouvert le 29 novembre, et les sujets qui devront conduire à des décisions ne manquent pas : avenir du nucléaire et montée en puissance des énergies renouvelables, approvisionnement et consommation des ressources naturelles, choix sur les modes de transports collectifs et les infrastructures qui leur sont liées, politique industrielle et agricole, responsabilités individuelles et collectives en matière de pollution en particulier et d’environnement en général. Et alors même que la conférence de Doha a entamé un long cycle de discussions pour faire suite à la déclaration de Rio de 1992.
Le débat rattrapé par l’actualité
De fait, l’actualité est venue percuter ce débat de fond et lui donner une réalité concrète : aéroport de Notre-Dame-des-Landes, liaison ferroviaire Lyon-Turin, centrale nucléaire EPR de Flamanville, par exemple, et tout récemment la possibilité d’extraction de gaz de houille, . Chacun de ces sujets généraux est d’importance, mais ils ne sauraient occulter des décisions politiques, judiciaires et législatives sur les questions de l’amiante, du bisphénol, ou des cancers « environnementaux ».
L’exemple concret de l’usine d’incinération de Gilly-sur-Isère (Savoie), avec le récent verdict de la Cour d’appel de Chambéry pose des questions de fond : comment ceux qui s’estiment victimes de pollution peuvent-ils faire reconnaître leurs dommages, souvent irrémédiables et mortels par la justice ? Mise en cause par des riverains et des agriculteurs attestant des conséquences de la dioxine émise par l’établissement sur l’herbe des prés environnants, le lait des vaches et la santé des mères et des enfants l’ayant consommé, la société Novergie Centre-Est, filiale de Suez-Environnement, gestionnaire de l’usine avait été condamnée en premier ressort par le tribunal correctionnel d’Albertville à 250 000 euros d’amende en 2011. Les parties civiles (200 personnes s’estimant victimes d’une pollution en 2000) avaient bénéficié de 80 000 euros de dommages et intérêts, les élus et fonctionnaires locaux (le maire d’Albertville et le préfet de Savoie de l’époque) ayant été blanchis. La Cour d’appel de Chambéry a relaxé le 21 novembre dernier Novergie Centre-Est, au motif que cette société n’est pas le responsable juridique de l’installation.
Le verdict, fondé en droit,selon Me Thierry Billet, avocat des victimes, apparaît injuste aux yeux des riverains touchés par l’exploitation de cette usine d’incinération, puisque ni la société qui l’a fait fonctionner ni les élus qui en avaient la responsabilité n’ont été inquiétés. De fait, c’est bien la responsabilité civile et pénale des élus comme des exploitants ou gestionnaires d’installation qui es en question. Un sujet de fond soulevé par la députée européenne et présidente de Cap 21, Corinne Lepage, par ailleurs avocate du public dans de nombreux procès comme le tout dernier gagné contre Total. Son collègue haut-savoyard, Me Thierry Billet, avocat des plaignants dans l’affaire de Gilly-sur-Isère, et actuel adjoint à l’environnement de la mairie d’Annecy atteste dans l’article qui suit de sa déception et de a difficulté à faire poursuivre les pollueurs..
Jean-François Cullafroz-Dalla Riva