Les journalistes, ces gêneurs

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Par Jean-François Cullafroz

De part et d’autre de la Méditerranée, ceux qui font profession d’informer le public peuvent considérer comme des empêcheurs de tourner en rond. Exemple à Alger mais aussi à Lille, où d’un côté les militaires et de l’autre les juges fourbissent leurs armes. En France, les menaces qui frappent les journalistes justifient le projet de loi sur la protection des sources que prépare la ministre de la Culture. Explications.

Le président Abdelaziz Bouteflika est toujours à l’hôpital du Val-de-Grâce à Paris. A Alger, Mon Journal et Jaridati, deux quotidiens donnent la nouvelle éoquant son « état comateux ». ils sont censurés, et n’ont pu paraître dimanche soir 19 mai. Le syndicat des journalistes algériens a immédiatement protesté. Il  a dénoncé  » cet acte liberticide que rien ne peut justifier tout en mettant en garde contre toute tentation de retour aux vieilles méthodes faites de chantages, sous toutes ses formes « . Non content de voir ses deux journaux, l’un francophone, l’autre arabophone interdits de tirage, le directeur de la publication est maintenant poursuivi par le Parquet général..

D’Alger à lille, la liberté de la presse est en question. (© DR)

Encore les fadettes …

Dans le Nord de la France, on a découvert en fin de semaine passée que deux juges voulaient avoir connaissance des communications de journalistes du Monde, de Libération et du Figaro. En cause, l’enquête  de ces confrères sur l’affaire DSK au Carlton de Lille.

Selon Le Monde, qui a consacré un billet de la directrice de la rédaction, Nathalie Nougayrède, et un article de Franck Johannès, les juges Fabienne Atzori et Richard Foltzer voulaient récupérer les factures de téléphone mobile (fadettes) des journalistes des trois quotidiens. Quant à  Libération, il souligne que « la mise en examen de journalistes pour « recel de violation du secret de l’instruction » par deux juges lillois «  aurait pu s’accompagner de perquisition au siège des journaux. Fort heureusement, leur demande a été refusée par le parquet de Lille.

Ce refus semble en phase avec le projet de loi préparé par le ministère de la Culture visant à accroître la protection des journalistes et le secret de leurs sources. En fin de semaine passée, les syndicats de journalistes CFDT, CFTC, CGC, CGT, SNJ et FO, qui n’avaient pas été auditionnés jusque là, ont reçu par courriel le texte du projet de loi pour conultation. il devrait être transmis au Conseil d’état pour avis avant un passage au Parlement dans quelques semaines.

Syndicats français de journalistes : réaction à venir

Pour l’heure, les syndicats français de journalistes n’ont réagi sur l’attitude des juges lillois, ni sur le projet de loi qui leur est parvenu avant le week-end de Pentecôte. Leur réaction ne devrait pas tarder et sans doute être en phase avec la Fédération européenne des journalistes (Fej), dont ils sont membres. le 24 avril dernier, la FEJ avait protesté contre la convocation de deux journalistes du site Internet slate.fr, Andréa Fradin et Pierre Alonzo dans le cadre d’une enquête préliminaire de la Direction du renseignement intérieur (DCRI).

A Alger comme à Lille, c’est bien la liberté de la presse, comme pilier de la démocratie, qui est en question. Au delà de mesures protégeant individuellement les journalistes et leurs sources, sont assurément nécessaires des dispositions permettant collectivement aux rédactions de mener à bien des investigations. Et cela, non seulement au niveau national pour quelques médias de renom, mais aussi dans les régions où la proximité des pouvoirs politiques et économiques locaux rime souvent avec pressions et intimidations plus ou moins déguisées.

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