Reportage de Jean-François Cullafroz, journaliste professionnel honoraire, carte de presse 49272
Après huit années de préparation, l‘immeuble Chamarel de Vaulx-en-Velin (Rhône) est habité depuis juillet 2017. Les habitants de seize appartements accueillaient vendredi 29 septembre leurs amis et les élus locaux et de la Métropole de Lyon pour une inauguration joyeuse et humoristique. Nous étions venus visiter le chantier en plein hiver 2016-2017 et nous étions de retour pour assister à l’inauguration. Rencontres avec des habitants de cet immeuble coopératif et communautaire, avec une élue et un architecte.
Dans les manifs, les militants chantent parfois » hasta la victoria siempre « , en référence à la ténacité cubaine et au Che, un de ses leaders. Souvent, c’est une figure de style qui masque l’impuissance des organisations syndicales et politiques occidentales. mais ici, à Vaulx-en-Velin, dans un petit terrain du vieux village, la démarche militante a bel et bien été conduite à son terme. Et ceux qui se réclamaient de l’autogestion il y a cinquante ans ont fait entrer dans les faits la possibilité de prendre en main concrètement leur vie.
Décider de construire et d’habiter différemment
En 2010, des ami.e.s voient arriver à grand pas la fin de leur temps d’activité salariée. Ils décident alors de ne pas vieillir seuls et d’organiser urbanistiquement la deuxième partie de leur vie, celle de leur retraite qu’ils souhaitent toujours active et bien inséré dans le tissu social de leur ville.
La réflexion s’entame et sur leur route, il rencontre Habicoop, un mouvement, qui depuis longtemps lorgne sur les initiatives menées pour l’habitat communautaire les pays nordiques, en Suisse avec la Codha ou même en Amérique du Sud, tel l’Uruguay. Ils bénéficient aussi de la sympathie et de l’aide financière d’ami.e.s qui soutiennent cette démarche citoyenne engagée. Car avec l’apport personnel de chacun, à hauteur d’au minimum 30 000 €, cet apport amical était nécessaire tout comme l’indispensable caution des collectivités locales, au premier abord peu enthousiastes.
Aujourd’hui quatorze des seize appartements T2 ou T3 sont occupés. Michèle Danière est entrée dans cette aventure en 2012, elle témoigne.
L’écologie vécue concrètement
Comme l’explique cette coopératrice, la démarche suivie depuis huit ans et qui entre dans le concret de la vie commune depuis l’été 2017, est tout à fait originale. Le maître-mot est bien le travail en commun. Approche concertée des futurs habitants avec leur architecte, réflexion et mise en œuvre avec et entre les artisans, étant les points d’ancrage les plus manifestes,
En janvier 2017, nous étions venus sur le chantier. Nous avions rencontré Hélios Lopez. Dans le cadre d’un collectif très dynamique, il est un des acteurs de cette coopérative d’habitants, la seconde dans la métropole lyonnaise, l’autre, le Village vertical, se situant à Villeurbanne, une commune voisine. Il présente l’immeuble Chamarel.
Avec l’appui du studio Arkétype
On l’aura compris, la démarche qui a consisté à ce que des citoyens vieillissants décident dans les moindres détails de leur lieu et modes d’habitation, est tout à fait innovante. Mais, au niveau des professionnels qui ont contribué à la conception du bâti, l’innovation a aussi été précurseure.
Stéphane Peignier est un des trois architectes associés du studio Arkétype, installé dans la même commune que l’immeuble Chamarel. Il explique sa démarche et ses espoirs pour le futur, tant en matière de construction que de rénovation écologique d’habitats collectifs.
Un vivre ensemble coopératif
La volonté habitants, militants convaincus et de longue de la nécessité de choix écologiques, a été déterminante dans la conception de l’immeuble Chamarel. Au cœur de l’hiver dernier, Hélios Lopez, nous avait fait visiter les locaux.
L’inauguration de l’immeuble Chamarel a été festive, c’était bien le moins, mais aussi quoique très officielle, elle a été empreinte de beaucoup d’humour. Aux côtés des ami.e.s et soutiens de différents horizons, étaient présents des artisans qui ont œuvré à son édification, les élus locaux étaient de la partie.
Une réalisation pour inspirer des décisions politiques
Bien sûr, Hélène Geoffroy, ex-secrétaire d’Etat à la Ville, et redevenue maire de Vaulx-en-Velin mais aussi des représentants de la Métropole de Lyon, telle Béatrice Vessiller, vice-présidente du Grand Lyon en charge de la rénovation urbaine.
Pour cette élue de Villeurbanne, militante d’Europe-Ecologie-Les-Verts (EELV), l’attention écologique concerne l’urbanisme dans son ensemble, tant au niveau global de l’aménagement de la cité que local dans la construction ou la remise à neuf de l’habitat.
Une fois l’inauguration passée, il reste à vivre au quotidien dans cet immeuble qui attend encore les occupants de deux appartements vacants. Il va falloir habiter collectivement en bonne intelligence, à commencer dans les parties communes dont dans les coursives, où sont partagés les meubles et bibliothèques répartis sur tous les étages.
Vie commune aussi dans la buanderie avec ses trois machines à laver, dans l’atelier où d’aucuns ont déposé leurs outils, dans le local à vélos et dans la cave. Sans oublier le partage de la chambre d’ami.e dont il faudra gérer le planning d’occupation. Visite au cours de l’hiver passé.dans un site en cours de construction. Hélios Lopez commente.
Une réalisation qui fera école…
Les initiateurs de cette aventure se connaissent bien aujourd’hui. Certains même sont amis depuis très longtemps tels Jean Sintès et Hélios Lopez, qui ont fait leurs premières armes militantes durant mai 1968.
Ils agissaient alors de concert au sein du comité de lutte de leur établissement, au Collège d’enseignement technique du bâtiment à Bron (Rhône). Avant de militer durant leur vie de salariés au sein de la CGT et de la CFDT du PSU et d’autres groupes politiques.
Désormais, c’est avec leurs ami.e.s, que les habitants de Chamarel vont aménager l’environnement extérieur : espaces verts, ruches sur la terrasse de l’immeuble et jardin. Avant les travaux d’automne qui produiront leurs fruits au printemps, un petit espace mural a permis de faire croître les premières courges, qui n’en doutons pas seront appréciées lors d’un repas collectif.
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